Initiative populaire cantonale constitutionnelle

Pour une politique culturelle cohérente à Genève

La culture renforce la démocratie et favorise le lien social. Elle contribue au rayonnement d’un territoire et dynamise son économie. Les artistes insufflent dans la société de nouvelles énergies et fécondent de nombreux secteurs d’activités comme l’éducation, l’architecture, la philosophie, les sciences et les nouvelles technologies. Par ailleurs, la culture conditionne l’attractivité d’une métropole ou d’une région. Pour toutes ces raisons, les pouvoirs publics soutiennent les arts et la culture.

Les dimensions artistiques et culturelles d’une société se déterminent au fil du temps, le plus souvent à l’initiative des artistes et acteurs culturels, dont le travail et les propositions questionnent notre temps. Ainsi les nombreuses structures culturelles ancrées dans le canton de Genève (compagnies indépendantes, sociétés de production audiovisuelle, maisons d’édition, théâtres, cinémas, salles de concert, musées, bibliothèques, opéra, manifestations et festivals, centres d’art, centres culturels) ont chacune une histoire singulière et des modes de fonctionnement qui leur sont propres. Il en résulte un maillage complexe et toujours mouvant du monde artistique, fruit d’une vitalité extraordinaire qui anime les différentes disciplines : musique, théâtre, cinéma, littérature, danse, art lyrique, arts plastiques et numériques.

Genève bénéficie d’une qualité de vie exceptionnelle due notamment à la richesse et à la qualité de son offre culturelle. Historiquement, la Ville de Genève est un acteur majeur de son essor, mais aujourd’hui, la densification de la population du canton et l’émergence de nouvelles villes modifient la réalité de ce domaine. L’exiguïté de notre territoire et l’évidente circulation des publics à l’intérieur du Grand Genève, appellent à élaborer une vision d’ensemble dans le domaine culturel et à instaurer une politique cohérente qui réunisse les collectivités publiques concernées.

Mise en place d’une gouvernance coordonnée entre les communes et le canton

Cette initiative populaire propose d’instaurer dans la Constitution genevoise les conditions d’une nouvelle gouvernance pour la culture, fondée sur une collaboration active entre les communes, les villes et le canton.

Aux yeux de la Confédération (Constitution fédérale art. 69), ce sont les cantons qui ont pour mission de soutenir le domaine culturel. À Genève, ce dernier garde pourtant un rôle mineur et subsidiaire. Certes, des avancées ont été faites, notamment en 2013 avec l’adoption d’une nouvelle loi cantonale sur la culture, contredite ensuite par la LRT (Loi sur la répartition des tâches entre les communes et le canton en matière de culture – 2e train). Cette dernière ne permet pas de répondre de manière appropriée aux défis que rencontrent la création artistique et les institutions culturelles.

Actuellement, le canton a décidé d’oeuvrer séparément des communes. Ces dernières doivent agir seules, sauf pour de rares exceptions. Nous constatons que ce mode d’action nuit aux projets culturels dans leur ensemble, en particulier à ceux qui ont pour vocation de faire rayonner Genève au-delà de nos frontières. Cette séparation des visions ne permet ni de consolider ce qui est institué, ni de renforcer ce qui émerge ou est en développement.

La richesse et la qualité de l’offre culturelle genevoise justifient que le canton et les communes coordonnent leurs forces, notamment financières, et collaborent activement pour :

  • Soutenir conjointement des projets artistiques ou des infrastructures d’envergure
  • Mettre en place une stratégie de développement et de soutien pour chaque discipline et entre les disciplines
  • Favoriser l’accès à la culture et la circulation des publics sur l’ensemble du territoire
    Accompagner l’évolution des carrières des artistes (formation, professionnalisation et rayonnement)
  • Permettre des partenariats locaux, régionaux et internationaux
  • Favoriser la diffusion des œuvres

La constante évolution des pratiques artistiques et des milieux culturels nécessite une consultation des artistes et acteurs culturels, qui sont au fait des réalités mouvantes du terrain. Basée sur des modalités claires et transparentes, cette consultation doit être régulière.

La modification de la Constitution proposée donne ainsi au canton le rôle essentiel de coordination. Cette initiative vise à l’établissement, en concertation avec les communes et les villes, d’une politique culturelle genevoise globale pour les soutiens à la création artistique (recherche, production et diffusion), au patrimoine, à l’accès à la culture et aux institutions.

Des modalités de financement adaptées à la réalité du secteur culturel

Actuellement, dans le domaine culturel, la répartition des tâches entre le canton et les communes est interprétée comme une séparation pure et simple de leurs compétences. Cette mise en œuvre fondée sur des financements exclusifs plutôt que complémentaires ou conjoints n’est pas adaptée à ce secteur qui est alors fragilisé dans son ensemble. L’exclusivité des compétences dévitalise l’émergence des projets culturels et crée des fonctionnements rigides incompatibles avec les indispensables interactions entre les disciplines, les institutions et les publics.

Cette initiative propose d’ancrer dans la Constitution genevoise le cofinancement de la création artistique et des institutions culturelles par le canton et les communes. Grâce à cet engagement financier, le canton devient un acteur crédible vis-à-vis des communes. Le terme « institution » est utilisé dans l’alinéa 4 de façon générique ; il couvre les fondations, les associations, les manifestations, les petites et les grandes institutions.

Les modalités et les parts de subventions du canton et des communes sont établies de manière variable selon les besoins de chaque institution et, pour la création indépendante, en fonction des nécessités spécifiques des différentes disciplines artistiques.

Le choix des modalités de gouvernance d’une institution relève de la collectivité publique qui octroie le soutien financier le plus important. Ainsi, la collectivité qui soutient majoritairement l’institution en devient la référente principale.

Seules les initiatives qui ne feront pas partie de la politique culturelle établie conjointement par le canton et les communes peuvent être financées par une seule collectivité publique. Les retombées sociales et économiques du secteur culturel, une force pour Genève.

Dans une économie à forte valeur ajoutée comme celle de Genève l’art et la culture sont un facteur de vitalisation : ils imprègnent toute la société de leur dynamisme en termes d’idées nouvelles. Elles favorisent l’intégration sociale, accompagnent chacun-e dans sa compréhension du monde, enrichissent tous les secteurs d’activités et représentent une valeur immatérielle précieuse. Par ailleurs, le domaine culturel est très concrètement un pourvoyeur important d’emplois directs et indirects pour le canton.

Il est donc grand temps que le canton considère le domaine culturel comme une mission prioritaire et qu’il élabore une vision stratégique pour son développement, en partenariat avec les villes et les communes, à la hauteur d’un rayonnement digne de Genève.

Cette initiative souhaite que les collectivités publiques mettent en œuvre une politique publique cohérente pour valoriser notre richesse culturelle qui profite très largement à l’ensemble de la population.